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N°I 2025 MuseoMag
pour venir en aide aux immigrés portugais, désireux
de mettre à profit ses connaissances juridiques. Il
deviendra alors le vice-président de l’ASTI et plus
tard le président du CLAE (Comité de liaison des
associations issues de l’immigration). Aux côtés de
Serge Kollwelter, des syndicats et du mouvement
associatif, il militera pour le droit de vote des étran-
gers et pour l’obtention des droits sociaux.
En les réunissant là où tant de luttes se sont autre-
fois déroulées pour l’avenir de la communauté luso-
phone, le musée a encore eu l’intuition de les asso-
cier à une autre figure historique du combat pour
les droits des travailleurs au Grand-Duché: António
Paiva, réfractaire à la guerre coloniale. Enfin, pour
couronner cette table ronde d’un caractère histo-
rique, il fallait bien encore convoquer un ancien
capitaine d’avril: ce fut chose faite en la personne
d’António Rosado da Luz. Celui qui le 25 avril 1974,
lors de l’encerclement de la caserne du Carmo où se
trouvait réfugié Marcelo Caetano sous la protection
de la Garde nationale républicaine (GNR), a trans-
mis un message décisif d’Otelo Saraiva de Carvalho,
commandant des opérations, au capitaine Salgueiro
Maia, avait lui aussi fait le déplacement au Luxem-
bourg. Quand d’une seule voix, tous se sont sponta-
nément mis à entonner des chants révolutionnaires
d’antan, l’émotion dans la salle était palpable…
UNE GRAINE POUR ÉCLORE
Pour conclure, traversons l’océan direction le Brésil
pour évoquer Tanto mar (« Tant de mer »), l’hommage
du chanteur brésilien Chico Buarque à la Révolution
des Œillets enregistré au moment où son pays est
sous le joug d’une dictature militaire qui durera vingt
ans. Il en livre deux versions. La première version –
censurée au Brésil mais éditée au Portugal – date
de 1975, en pleine période révolutionnaire, et dresse
un parallèle entre la joie des Portugais et la soif de
liberté de ses frères au Brésil: Je sais que tu es en
fête, mec / J’en suis heureux / Et tandis que je suis
absent / Mets-moi un œillet de côté. Trois ans plus
tard, en 1978, une nouvelle version déplore la fin de
l’utopie, après le 25 novembre 1975 qui met fin au
PREC. Ta fête a déjà flétri, mec / Mais on a sûrement /
oublié une graine / dans un coin du jardin.
Au moment où, un peu partout, le monde se tourne
dangereusement vers des idéologies d’extrême-
droite, le souvenir du 25 avril redonne espoir. Fêter
son jubilé, comme l’a fait si généreusement le
Nationalmusée, c’est prendre soin de cette semence
pour cultiver l’esprit de citoyenneté.
Paula Telo Alves EXPOSITIONS