7 04 ‘ 2020 museomag
RECHERCHE
de la famille grand-ducale. L’époux de la Grande-
Duchesse Charlotte, le Prince Félix, avait d’ailleurs lui-
même des intérêts coloniaux au Mozambique, où une
société de droit luxembourgeois, nommée Granducol,
exploitait de grandes plantations de coton lui appar-
tenant.
Les Luxembourgeois ont donc aussi participé à
un système politique, économique et social dont les
fondements reposent sur l’inégalité entre ce qu’on
appelait alors les «races» (distinctions opérées princi-
palement suivant la couleur de peau), définies par une
pseudo-science aujourd’hui révolue. Ce qui caracté-
rise en effet les sociétés coloniales est qu’une minorité
allochtone, souvent européenne, s’arroge tous les
postes de décision politique, économique et sociale
sur la majorité autochtone de la population.
MUTILÉS PUIS BÂILLONNÉS
Cette inégalité fondamentale qui dans certains cas
a pu déboucher sur des ségrégations très strictes de
colour bar comme dans le système d’apartheid en
Afrique du Sud, est caractéristique de l’ère coloniale.
Les violences infligées par les colonisateurs aux colo-
nisés ont été parfois d’une insondable atrocité. Plus
tard, la violence physique fut remplacée par l’exclusion
sociale et l’absence de perspective d’ascension profes-
sionnelle ou sociale pour les colonisés. Longtemps, ces
derniers n’ont pas eu droit à la parole dans l’histoire
coloniale alors qu’ils en sont partie prenante et que les
sociétés africaines, asiatiques et américaines ont été
transformées en profondeur par le colonialisme. Ces
voix seront intégrées dans l’exposition de 2022 afin de
présenter la complexité de l’histoire et de ne pas lais-
ser, comme cela se fait encore souvent, uniquement
la parole aux «vainqueurs» de l’histoire. Les personnes
originaires des anciennes colonies et les enfants de
parents originaires de deux continents vivant au-
jourd’hui au Grand-Duché ont dans notre société tout
autant voix au chapitre de l’histoire coloniale que les
ONG luxembourgeoises œuvrant dans les anciennes
colonies. Les relations entre le Luxembourg et l’Outre-
mer ont certes largement évolué au courant des der-
nières décennies – tout comme elles n’ont jamais été
figées pendant la période coloniale – mais il reste que
cette histoire demeure centrale dans la construction
des sociétés contemporaines.
Régis Moes
APPEL À CONTRIBUTIONS
Dans le cadre de l’exposition prévue en 2022, le
MNHA recherche des personnes susceptibles de
contribuer à une meilleure compréhension de
l’histoire des relations du Luxembourg avec les
pays anciennement colonisés. Avez-vous de la fa-
mille ayant vécu en Outre-mer avant 1960? Possé-
dez-vous des objets ou des photographies en lien
avec cette histoire coloniale luxembourgeoise? Ou
avez-vous des témoignages personnels ou famili-
aux intéressants sur ces sujets? Nous vous serions
reconnaissants dans ces cas de contacter Régis
Moes, conservateur en charge du projet, par mail
à histoire@mnha.etat.lu ou par téléphone au
47 93 30 – 213.
La propagande coloniale était présente au Luxembourg,
notamment en 1933 lorsqu‘une grande exposition coloniale
fut organisée au Cercle municipal en Ville.