6 museomag 04 ‘ 2020
La culture matérielle au Luxembourg a aussi véhiculé des clichés racistes, à l‘exemple des tirelires où on déposait une pièce dans la
bouche d‘un Africain, comme si l‘Afrique était dépendante de l‘Europe pour subvenir à ses besoins.
©
éric
chenal
de trois quarts des Luxembourgeois quittent le Congo
dès l’indépendance tumultueuse à l’été 1960 montre
combien ces relations s’inséraient dans le cadre du
système colonial.
FORTUNE ET INFORTUNES
Si dans les années 1950, le système colonial se voulait
modernisateur, en favorisant la construction de nou-
velles infrastructures de santé et de transport et en
améliorant le système éducatif, cela n’avait pas tou-
jours été ainsi. Le début de la colonisation du Congo
avait été marqué par une violence sans pareille avec
un système d’exploitation du caoutchouc qui fit plu-
sieurs milliers, voire même plusieurs millions de morts.
À ces aventuriers sanguinaires succèdent ensuite les
ingénieurs constructeurs de chemin de fer, les mis-
sionnaires et les fonctionnaires. Des Luxembourgeois
participent à toutes ces étapes du processus colonial
belge. Certains y font fortune, d’autres meurent dans
la misère.
Le Congo belge était donc une colonie qui apparte-
nait un peu au Luxembourg, mais des Luxembourgeois
ont également été dans les colonies des autres avec
des fonctions très différentes: militaires de la Légion
étrangère française ou de l’armée coloniale néerlan-
daise en Indonésie, ingénieurs construisant des chemins
de fer au Proche-Orient et en Amérique du Sud,
sidérurgistes en Chine, explorateurs en Algérie et en
Asie centrale, missionnaires catholiques ayant essaimé
sur toute la planète, les Luxembourgeois ont participé
comme tous les Européens au système colonial. Même
si l’État luxembourgeois ne fut jamais impliqué de droit
dans le colonialisme, tous les gouvernements ont sou-
tenu les Luxembourgeois voulant partir en outre-mer.
LE CHAPITRE DES « ZOOS HUMAINS »
Rappelons ainsi la propagande des «zoos humains» où
des personnes issues d’autres continents étaient pré-
sentées comme des bêtes de foires à la Schueberfouer,
dans des cirques et lors de diverses foires entre 1900
et 1936. Les écoliers luxembourgeois collectionnaient
alors du papier aluminium et pouvaient acheter des
photos «d’enfants païens» pour financer les missions
catholiques en outre-mer. En 1933 et 1949, des expo-
sitions coloniales eurent lieu au Cercle municipal de la
capitale. Plusieurs conférences et projections de films
à la gloire des colonies eurent lieu au Luxembourg, en
présence de nombreux hommes politiques et même
CE PASSÉ COLONIAL
QUI NOUS HANTE (2/2)