l'affranchissant à son tour, tandis que les Surréalistes introdui-
sirent leurs sondes dans le subconscient pour révéler les étranges
déformations que subit le monde extérieur dans le puits de
notre âme. De plus en plus l’art, qui pendant la Renaissance
s'était intéressé surtout au monde physique, s'appliqua à explorer
le domaine des réalités intérieures et à mettre pleinement en
valeur les ressources de ses moyens.
Freinée quelque peu, entre 1930 et 1940, par les hésitations
de la fatigue, cette tendance s’est de nouveau vigoureusement et
héroïquement affirmée à partir de 1941, au moment où la France
commençait à s’insurger contre la défaite et à reprendre confiance
dans ses forces et sa mission. Face à l'occupant qui déclarait
dégénéré tout l’art moderne, face également à ceux qui avaient
cru que Fauves et Cubistes étaient allés jusqu’au bout et que le
salut dorénavant ne pouvait être que dans un retour en arrière,
les artistes de 1941 (c'est-à-dire ceux, en somme, que présente
cette exposition) ont proclamé que bien au contraire il fallait
marcher en avant, que Matisse, Picasso, Braque, Léger n'avaierit
pas fermé mais ouvert une voie et qu'aujourd hui celle-ci était
la seule sur laquelle il fát possible de cueillir des fruits jeunes
et enivrants.
En faisant abstraction des différences individuelles (qui
sont importantes), on peut dire que ce qui caractérise ces peintres
avant tout, c’est leur refus du naturalisme. Même là, cependant,
où leur art est « irréaliste », ses racines plongent dans la réalité
et s’en nourrissent. Et il traduit une réalité, une réalité ressentie
et non seulement observée, la réalité d'une émotion. C'est ce
qui prouve du reste combien il est humain. Quoique la figure,
le corps de l'homme n'y apparaissent que rarement ou n'y
appataissent que « déformés », l'homme y manifeste sa présence
pat ce qu'il a de plus intime: sa sensibilité, et par ce qu'il a de
plus spécifique: son esptit créateur et ordonnateur.
Renonçant à l’éloquence facile de l’objet précis et familier,
ces peintres, tels les compositeurs de musique, s'expriment par
des équivalents, des signes qui s’appellent: couleur, ligne, forme.
Couleur surtout, couleur franche, pure, intense.
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