La presente exposition nous avait ete inspiree — il y a quelque temps — par
la celebre oeuvre d’Andre Malraux: «Le Musée imaginaire». Toutes proportions
gardées, elle pourrait en former un complément, la différence résidant notam-
ment dans la dimension des objets représentés. C'est pourquoi nous la dédions
à la mémoire de ce grand homme.
L'idée était d'essayer de réunir un choix des plus belles monnaies et médailles
émises depuis l'antiquité, en retenant comme critére la seule valeur artistique.
Quelle démarche fallait-il envisager pour atteindre à ce but? La meilleure
solution — et la seule aussi, pensons-nous — était sans doute de laisser faire
ce choix par les conservateurs des grandes collections publiques qui, eux,
connaissent le mieux l’immense matériel numismatique confié à leur garde.
Un choix de cette nature eut risqué aussi de dévier unilatéralement s’il avait
été fait par une seule personne; la collaboration d’une vingtaine de collègues
a évité une telle déformation. Demander à chacun d’eux de choisir dix côtés
(avers ou revers) était cependant presque une gageure si l’on songe que cer-
taines collections, parmi les plus grandes, comptent jusqu’à trois quarts de
million de monnaies et médailles. Mais les résultats obtenus font apparaître
comme injustifiée l’appréhension que l’on aurait pu avoir à ce sujet. En deux
cas seulement nous avons ajouté une sélection de pièces choisies par nous
dans des médailliers étrangers (Paris II et Trier II).
Les monnaies et médailles ainsi choisies sont exposées sous forme de moulages
ou de photographies et cela pour deux raisons: d'abord parce qu'il s'agit en
grande partie de piéces extrémement rares et partant précieuses, dont le prét
n'eut été en général ni possible, ni d'ailleurs souhaitable; ensuite parce qu'à
la méme occasion nous désirons faire une expérience qui nous semble inté-
ressante. En effet, tout comme une glyptothéque constituée uniquement de
moulages de sculptures célébres réussit parfaitement à conférer au visiteur
une image fidéle des oeuvres représentées, on devrait arriver à un résultat
comparable dans le domaine de la numismatique en transposant la gravure
sur un support neutre et uniforme tel que l'offre la photographie ou mieux
encore le moulage. Nous verrons dans quelle mesure les amateurs d'art appré-
cieront d'étre confrontés avec le seul art du graveur, dissocié du métal aux
reflets fauves ou à la patine attrayante, auquel il était si intimement lié.
A regarder de prés les différents ensembles contribués à l'exposition, l'on
constate que les choix se sont portés de préférence sur les «valeurs süres»
traditionnelles des principales époques de l'art.
Une seule oeuvre grecque, parmi celles qui sont exposées, nous fait connaitre
le nom de son créateur: il s'agit d'un superbe décadrachme frappé à Syracuse
vers 400 av. J.-C., portant la signature du graveur Euainetos (London, 1). Dom-