est à l'antipode des tentatives de l'art pri-
mitif.
Sans renoncer à la tradition, Daeye la per-
pétue au contraire jusqu'en ses ultimes
conséquences, qui le raménent aux sources
de l'art. Son art est citadin et atteint son
plein epanouissement par l’echo d’hyper-
sensibilité qu'il éveile dans le coeur et
l'esprit du spectateur privilégié.
De plus, Daeye est avant tout un psycho-
logue, dont l’œuvre fourmille d'intentions
secrètes, d'allusions cachées. Mais c'est un
psychologue de la simplicité, de la fraiche
àme enfantine, plus subtile que complexe.
On a de bon droit vanté son coup de pin-
ceau fébrile et nerveux, dont la force d'en-
voütement réside essentiellement en une
sensibilité presque exagérée. L'écrivain fla-
mand Emmanuel de Bom qualifie son style
« un luxe discret qui revit doucement en
vous ». ll loue la richesse sobre des harmo-
nies qui résultent du contraste d'un jaune-
cinabre et d'un gris voilé « comme le
duvet d'une aile de pigeon, avec par-ci,
par-là, un vert mourant ou un vieux-rose
éteint, un vert-mousse à côté d'un mauve
attenue ».
Toutefois, n’oublions pas le talentueux des-
sinateur qui ne reste jamais insensible à la
plasticité de la forme, à la ligne et à la
structure du modèle. Les détails anatomi-
ques sont traités librement et réduits à leur
plus simple expression; c'est pourquoi l'en-
semble fróle parfois la déformation, défor-
mation jamais voulue mais née de l'émotion
et du réve.
Le jeu des couleurs viendra parfaire l’ebau-
che et la f&erie est telle que le peintre de-
vient poéte; dans son lyrisme, la vérité
d'expression lui est plus chére que l'exac-
titude dans la construction.
Cette aspiration vers le vague et l'imprécis,
vers le moment indéfinissable, est si nette-
ment picturale qu'il en découle un équi-
libre classique entre la ligne et la couleur;
un équilibre basé sur un sévère dosage per-
sonnel, formule de travail libre de toute
influence extérieure.
AUGUST CORBET.
Monographies de l'art Belge (Ministère de l'instruction publique)
Né à Gand en 1873. Mort à Berchem-Anvers en 1952. Suit les cours de l'Académie des Beaux-Arts de Gand,
puis ceux de l'Institut supérieur d'Anvers, où il se fixe par la suite. Nombreux voyages à l'étranger entre
autres, en ltalie, en Espagne et en Angleterre, où il passe les années de la premiére guerre mondiale. S'y
lie d'amitié avec Permeke, Tytgat et Van de Woestijne. Membre de « L'art contemporain », du « Groupe
des IX », de « Art vivant », des « Compagnons de l'art ». Membre de l'Académie royale flamande pour
les Sciences, Arts et Lettres de Belgique. Premiére exposition personnelle en 1924. Grande exposition
rétrospective au Palais des Beaux-Arts en 1945. Expose en Belgique et à l'étranger.
Œuvres dans les musées belges et étrangers (Paris, Grenoble, Belgrade, Tel-Aviv, etc...).