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Le thé ou l’ouverture à l’Asie
Jean-Luc Mousset
Au
XVIIIe
siècle, l’intrusion de l’Asie dans l’univers mental
des habitants du Luxembourg modifie leur représentation du
monde. Ce continent est à l’origine de l’innovation en ma-
tière de goût avec le développement de l’exotisme. La mode
des boissons chaudes sucrées, comme le thé et le café, gagne
les élites, puis progressivement la bourgeoisie.
Récemment, le MNHA a eu la chance d’avoir pu acquérir
une rarissime théière en argent de l’orfèvre de la ville de
Luxembourg, Jean Michel Kutzer (vers 1700-1766). Des
considérations stylistiques et techniques permettent de la da-
ter vers 1730. Il s’agit donc d’une œuvre d’un Kutzer relative-
ment jeune encore et qui, venant de la Bavière, a commencé à
travailler à Luxembourg au plus tard en 1727. Signalons que
les pièces d’argenterie de table luxembourgeoise se comptent
sur les doigts d'une main.
Haute de 15,5 cm, la théière est en forme de poire avec des
côtes droites qui se prolongent dans le couvercle renflé. La
panse repose sur un petit pied. Le goulot curviligne est divisé
au milieu par un anneau. Le bec pouvait à l’origine être fermé
par un couvercle dont il ne reste plus que la poucette. L’anse
en bois noirci est tracée en point d’interrogation muni d’une
poucette. Enfin, le couvercle sommé d’un fleuron ouvre laté-
ralement à l’aide d’une charnière à poucette.
L’arrivée du thé en Europe va de pair avec une autre nouveauté
venue également d’Asie, la porcelaine. En effet, le thé est servi
à l’origine dans les bols à soucoupe en porcelaine chinoise.
à Luxembourg, l’archéologie atteste l’usage de ce genre de
céramique à la fin du
XVIIe
siècle chez les Neunheuser, fa-
mille de la bourgeoisie de robe, et vers 1740-1750 au Conseil
provincial où se réunit l’élite urbaine. L’avocat de Mignon
fig. 1 Théière,
no
d’inv. : 2008-
098/001 (© MNHA, photo Tom Lucas).