soucieux d'ordre plastique et trop averti, trop jaloux peut-étre aussi de son
individualité, pour donner dans le panthéisme, Le Moal continue à imposer
à ses compositions le máme agencement fortement structuré ; la différence,
c'est que, désormais, il sera plus secret, caché savamment sous une liberté
apparente, et, d'autre part, plus dynamique. Les obliques se substituent aux
verticales, les courbes se multiplient, l'œuvre vibre davantage, en accord avec
son harmonie colorée, plus puissante, plus variée. C'est alors qu'apparais-
sent, sur la palette de l'artiste, ces mauves, ces lilas, ces violets qui dominent
depuis dans son ceuvre — en relation avec leurs complémentaires, les
jaunes, ou avec leurs binaires, les verts. Mélodiste auparavant de quelques
tons bien timbrés, Le Moal s'est mué en symphoniste opulent de couleurs
somptueuses qui font de chacune de ses toiles un bouquet chatoyant. Fait
également significatif de cette évolution spirituelle : l'aquarelle devient
désormais un de ses moyens d'expression les plus chers et les plus heureux,
comme si sa spontanéité convenait davantage à cet art de plus en plus
libre et de mieux en mieux accordé à la grande vie de la nature.
Mais, quelle que soit la diversité de l'inspiration de Le Moal et si diffé-
rentes aussi soient ses manières successives (quel abîme, par exemple, entre
les tableaux de 1940-1946 où les bleus et les rouges éteints qui dominent dans
le chromatisme sont emprisonnés dans le réseau du graphisme, et les
tableaux actuels d'où a apparemment disparu toute écriture et qui sont des
feux d'artifices de couleurs multiples et somptueuses !), Le Moal n'en est
pas moins et n'en demeure pas moins, avec un doux entêtement, une