nous des montagnes inquietantes auxquelles des couleurs rougeätres donnent par-
fois l'aspect d'une chair déchirée. Plus encore que des paysages alpestres, ces
ouvrages nous font voir les palpitations d’un cœur passionné et souffrant.
Les œuvres expressionnistes de Stoffel ont été créées au cours de la dernière
guerre et dans les premières années qui ont suivi la libération. Aussi l'humanité
que nous y rencontrons est-elle souvent inquiète, menacée, et il arrive qu'elle soit
grotesque et pitoyable. Ce qui la fait vivre sur la toile, c’est moins la couleur
que ce graphisme volontaire, tendu, tour à tour flexible et appuyé, mais toujours
énergique, par lequel Stoffel s’est distingué jusqu’au moment où, vers 1949, il
est devenu chez nous l’un des principaux promoteurs de l’art abstrait.
Trémont, à vrai dire. ne peut étre classé ni parmi les Impressionnistes
ni parmi les adeptes de l'Expressionnisme, bien que lui aussi ait figuré dans les
salons de la Sécession. Si on lui doit quelques bustes, il est surtout un animalier
et ses préférences vont aux animaux exotiques qu'il étudie au Jardin des Plantes
à Paris. Il les représente en peinture, en sculpture, dans des dessins, et tandis
qu'à ses débuts il cherche une forme ramassée, plus tard le désir de montrer avec
exactitude ce que la structure et la silhouette de chaque animal ont de particulier
le pousse vers une maniere plus réaliste. Tout compte fait, Trémont s'applique
à exprimer moins ce qu'il sent que ce qu'il voit et ce qu’il sait; il reste près de
l’objet à une époque où, à Luxembourg comme ailleurs, l'art est de plus en plus
entrainé vers l'affirmation du subjectif et vers la libre invention.
Joseph-Emile MULLER