Par certains côtés, Sosthène Weis peut à son tour être rattaché à l'Impres-
sionnisme. La vérité est méme qu'aucun de nos peintres n'a été plus attentif que
lui aux variations que font subir aux couleurs la lumière et l’atmosphère. Mais
Weis ne se contente pas de voir, il rêve devant la nature, il s’enthousiasme pour
elle, il lui dit son amour en termes exaltés. Bref, il est un poète, un visionnaire.
À telle enseigne que ses paysages souvent paraissent imaginaires et que les couleurs
sont inventées avec une audace à laquelle la technique de l’aquarelle et le petit
format enlèvent toute agressivité, mais qui n’en est pas moins certaine. On connaît
encore peu chez nous l'aspect le plus poétique, le plus frémissant de l'art de ce
peintre. C'est pourquoi il nous a paru indiqué de le mettre pleinement en évidence
dans cet ensemble.
Les noms de Klopp et de Kutter sont lies au mouvement de la Secession
qui, s'opposant au Cercle Artistique, s’est efforce entre 1926 et 1930 de défendre les
premieres positions conquises chez nous pour ceux que l'Impressionnisme ne satis-
faisait plus. En France, les réactions contre l'esthétique de Monet s'étaient affir-
mées des le milieu des années quatre-vingts et les principaux mouvements révolu-
tionnaires de l'art moderne, le Fauvisme, l'Expressionnisme, le Cubisme, la pein-
ture abstraite, étaient apparus chez nos voisins entre 1905 et 1911. Il fallut
attendre qu’une seconde vague expressionniste déferlât sur l’Occident au lendemain
de la guerre de 1914-1918, pour que, grâce à quelques jeunes qui pour la plupart
avaient fait leurs études en Allemagne, l'esprit nouveau s'introduisit également
dans l'art luxembourgeois.
Si l'on veut parler d'expressionnisme à propos de Klopp, l’on doit d’ailleurs
prendre le terme dans cette acception très large que lui ont donnée les Allemands
(pour lesquels il désignait, on le sait, tout art qui réagissait contre l’Impression-
nisme). Klopp en effet simplifie plus qu’il ne déforme; il est hostile à toutes
les outrances et il n’a rien de tourmente. Il se signale au contraire par sa sérénité,
ses délicatesses, sa discrétion. Mais il n'hésite pas à transposer le monde extérieur
dans un coloris pur qui, s'il est parfois saturé, évite toujours d'étre cru.
Un tout autre climat se voit chez Kutter, où ce sont la mélancolie, l'ápreté,
le pathétique qui l'emportent. En définitive, et l'on s'accorde aujourd'hui pour
le reconnaitre, l'Expressionnisme n'a pas trouvé chez nous de représentant plus
caracteristique et plus émouvant. Mais si une äme torturée se révéle dans les
paysages de ce peintre aussi bien que dans ses figures, son style ne manque pas
de fermeté, sa forme reste solide et son riche coloris est tout ensemble grave et
rayonnant.
Berthe Brincour ne nous a pas laissé que des dessins. Toutefois, ce sont les
dessins qu'elle réalise vers 1937 qui constituent son apport le plus original. Sans
doute y avoue-t-elle son admiration pour les estampes japonaises, mais son trail
y est aussi personnel que son sentiment de la vie. Les lignes sillonnent la page
avec impétuosité, elles se courbent, se tordent, se crispent, et font surgir devant