Full text: Étapes de l'art luxembourgeois

INTRODUCTION 
Pour retracer l’histoire de l’art au Luxembourg pendant la premiere moitié 
de notre siècle, on aurait pu composer une exposition panoramique et représenter 
par une ou deux œuvres tous ceux qui au cours de cette période se sont manifestés 
dans nos salons. Il nous a paru plus intéressant de limiter le nombre des artistes 
(afin de pouvoir montrer de chacun autre chose qu'une « carte de visite ») et de 
ne retenir que ceux qui illustrent le mieux les principales tendances que notre 
art a connues depuis l'Impressionnisme jusqu’à l'entrée en scéne des protagonistes 
de l'« Irréalisme » et de l’Abstraction. A une exception près, la carrière de tous 
ces artistes est d’ailleurs achevée, leur œuvre possède sa figure définitive, de sorte 
qu'il est possihle d’en déterminer le rôle historique et d’en mesurer la portée. 
L’Impressionnisme est baptisé à Paris en 1874, mais ce n'est que vers le 
début de notre siècle qu'il commence à exercer une action sur les peintres luxem- 
bourgeois. Si Seimetz se montre sensible à l'atmosphère du plein air lorsqu’en 
1893 il peint sur les bords du Mississippi, il ne s’attache à noter la variété des 
effets lumineux qu'apres 1900. Lang se laisse séduire par la manière impression- 
niste aux alentours de 1906, mais il ne la pratique de façon suivie qu'à partir 
de 1912-1913, tandis que Beckius ne l'adopte qu’après 1920 pour lui rester fidèle 
jusquà sa mort en 1946. 
Encore faut-il dire que la plupart de nos peintres n’ont retenu de l'Impres- 
sionnisme que le souci de noter, à l'aide d'une palette claire, les apparences du 
motif devant lequel ils avaient planté leur chevalet. L'analyse de la lumiere cepen- 
dant et sa traduction par les couleurs pures du prisme ne les ont guère préoccupés. 
Or, c’est à cette analyse et à cette traduction que Monet et ses amis attachaient 
une importance des plus grandes, et ce sont elles qui devaient finalement incliner 
la peinture vers l’irréalisme. Autrement dit, nos artistes sont en général restés 
indifférents à ce qu'il y avait de spéculatif dans l'art des Impressionnistes francais, 
leur but essentiel étant, non de transposer la nature, mais de la reproduire avec 
sensibilité. Ne peignaientils pas avant tout pour communiquer aux autres le 
plaisir, la Stimmung qu'ils éprouvaient en présence de tel ou tel site ? Et leur 
fidélité au motif ne leur semblait-elle pas d'autant plus naturelle que le site 
souvent leur était cher parce qu'il faisait partie du cadre de leur vie ? Cela ne 
les empéchait pas certes de traduire ce que leur tempérament avait de particulier. 
Et Beckius, avec sa manière voilée qui assourdit chaque teinte, se différencie de 
Seimetz qui est moins attendri, plus direct et plus vif. Lang, dans une certaine 
mesure, fait exception à la règle. Déjà sa facture, qui dénote l’influence des 
« pointillistes », exige qu’il interprète ce que le motif lui propose. Aussi est-il, 
de tous nos Impressionnistes, celui qui se rapproche le plus des Français, qui a la 
couleur la plus pure et qui en use avec le plus de liberté.
	        
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