et pointues comme des lances, des courbes acerees comme des faux
et des faucilles. On remarque aussi que le combat n’est pas une lutte
à mort, mais une compétition, un spectacle dans un climat de fête.
Ce qu'il reste de figuratif dans cette toile s'estompe ou disparait
au cours des années suivantes, et vers 1956 Bertholle a trouvé la
manière qu’il illustrera désormais. Non que toute référence au monde
extérieur soit maintenant écartée de façon systématique. Dans les
œuvres qu’il peint à la suite d’un séjour à Venise, des vestiges de la
réalité demeurant apparents : le chatoiement de l’eau sous l’action
d’une fine lumière grisâtre, les reflets des palais, le glissement silen-
cieux des gondoles. D'autre part, on apprend ce que l'artiste a ressenti,
ce qu'il a pensé: que ce monde séduisant est menacé, qu'il n'est
qu'une apparence évanescente, que les formes solides y ressemblent
un peu à des épaves. Pourtant, les tableaux dans lesquels tout cela
s'exprime ne manquent pas de structure. En 1957-1958, Bertholle
donne à sa composition une charpente géométrisée, non seulement
quand il se propose d'évoquer le fluide, mais aussi quand il traduit
ses sentiments religieux, quand il inscrit sur sa toile la ferveur et les
élans d'un Magnificat.
En 1959, il brise cette charpente. la fait voler en éclats. Est-ce
pour s’abandonner à l’effusion éruptive ? Non, c’est simplement pour
se libérer davantage. Bertholle renonce à la précision de la forme,
parce qu’il sent en lui des forces bouillonnantes dont elle gênerait
l’expression. Et de nouveau c’est un peintre ancien qui a contribué a
lorienter : Tintoret. La lumière fulgurante et pathétique du vieux
maître italien, son amour du mouvement, le peu de pesanteur qu’il
laisse aux corps, tout cela vient d’impressionner Bertholle; tout cela
se rencontre désormais — assimilé, transformé — dans sa propre
peinture. Au reste, la période explosive se termine rapidement : dès
1961, les formes sont moins déchiquetées, et les tableaux ont retrouvé
une ordonnance visible. Seulement, elle est plus libre que naguère,
plus complexe, plus dynamique.
Bertholle a été beaucoup hanté, au cours de sa carrière, par le
thème du combat. Dans ses œuvres récentes, ce thème revient pour