PRÉFACE DE LA IIe ÉDITION (1967)
Si, grâce à des achats occasionnels et à des dons, quelques œuvres d’artistes
étrangers appartiennent au Musée depuis un certain temps déjà, la décision de
constituer une collection d’art contemporain n’a été prise qu’en 1958. Or, avec
les moyens dont on disposait, il était trop tard à ce moment-là pour se procurer
encore des peintures et des sculptures de ces maîtres universellement reconnus
(à l’heure actuelle) qui se nomment Bonnard et Matisse, Dufy et Rouault, Picasso,
Braque, Delaunay et Léger, Kandinsky, Klee, Miro, Chagall, Brancusi, Laurens,
etc. Il fallait donc ou bien renoncer à former une collection qui fût vraiment
significative, ou bien acquérir des œuvres créées par des artistes qui ont succédé
aux maîtres d’hier et dont certains apparaîtront un jour (aux yeux de tous) comme
les maîtres d’aujourd’hui. C’est la seconde formule qui a été adoptée par la Com-
mission d’achat du Muséc et approuvée par le Ministre des Affaires Culturelles.
Il en est résulté, avec logique, une collection où dominent les formes et les
couleurs inventées, mais inventées dans la majorité des cas par des artistes qui
demeurent en contact avec ce qu’on appelle la nature. Cette remarque ne vaut
pas seulement pour ceux qui sont manifestement des figuratifs, mais elle s'applique
aussi à ceux chez lesquels les objets ont cessé d'étre identifiables.
Est-ce à dirc qu'on n'a rassemblé que des jeunes, des peintres (car c'est sur la
peinture que l'on a voulu mettre l'accent d'abord) qui n'ont pas encore dépassé
le stade de la première expérimentation et des tentatives hasardeuses? Nullement.
Sur les cinquante-huit artistes représentés, il n’y en a que huit qui sont nés après
1920. La plupart ont donc derrière eux une longue carrière et leur art est le résultat
de recherches ardemment poursuivies pendant des années. Aussi la personnalité
de chacun a-t-elle eu le temps de s’affirmer, à telle enseigne que nous sommes en
présence d’œuvres qui, tout en pouvant offrir des affinités, sont parfois très éloignées
les unes des autres.
Considère-t-on les protagonistes d’une figuration libre qui usent de couleurs
vives? On découvre dans les paysages expressionnistes de Gubler non pas de la
gaieté, mais de l’abattement, voire une anxiété pathétique, alors que chez Garbell,