I N T RO D U C T I O N
LE temps n'est plus oü l'on croyait que la seule esthétique
valable était celle de la Renaissance. Toute l'histoire de
l'att nous apprend qu'il existe autant d'esthétiques qu'il y eut de
civilisations, chacune d'elles étant liée à un moment, un milieu
donnés, chacune connaissant sa période de vitalité féconde et sa
période d'épuisement. Ainsi, c'est de la mort de l’art instauré
par la Renaissance qu'est né l’art d'aujourd'hui. Personne, en
effet, ne songe plus à nier que la peinture qui compte dans les
années 1870 à 1890, c'est celle des Impressionnistes et non celle
des peintres académiques qui, à la même époque, s’obstinaient ‘à
vouloir perpétuer des beautés célèbres, vénérées et vénérables
certes, mais usées, et qui ne réussissaient plus qu'à les affadir,
qu'à les montrer vides de sang et d'áme.
Or, l'Impressionnisme est le point de départ de la peinture
contemporaine, c'est lui qui, à la place de l'objet, a mis la
sensation que celui-ci produit dans l'homme, c'est lui qui a
substitué à la présentation de choses connues, la fixation d'as-
pects inédits, à l'étude de la forme, l'analyse de l'effet coloré.
Mais la sensation, chez l'Impressionniste, n'affectait que
l'œil, et son image, de ce fait; restait en rapport étroit avec la
nature qui l'avait provoquée, au fond elle était et elle se voulait
naturaliste.
Ce furent les Fauves, et en premier lieu, Henri Matisse,
qui, à la suite de Cézanne, de van Gogh et de Gauguin, ont
ouvert à la sensation tout leur étre et l'ont traduite avec une
couleur émancipée, consciente de son pouvoir non pas imitateur
mais expressif. Moins sensuels, les Cubistes se consacrèrent à
l'examen de la forme dont ils dégagèrent toutes les vertus en
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