pessimistes ou désespérés. Ils estiment au contraire qu'il faut secourir
l'homme et quand Kokoschka traite certains sujets historiques,
bibliques ou mythologiques, c’est pour évoquer des situations où le sort
de l'homme est en cause comme il l'est dans le monde d'aujourd'hui.
Les oeuvres réunies dans cette exposition illustrent le chemin que
Kokoschka a fait depuis ses débuts jusqu'à une époque récente. On
ne s'étonne pas qu'il ait commencé par porter de l'intérét au Jugendstil.
Né en 1886, il étudie en effet à Vienne au moment où s'y épanouit
l'art de Klimt. Mais la ligne glissante de ce dernier se raidit chez lui,
se fait tortueuse, tourmentée. Et si d'abord sa mise en page est assez
décorative, elle n'est bientót plus dictée que par une volonté expressive,
voire expressionniste. Du méme coup disparait aussi toute tendance
à la joliesse et l'atmosphére devient pathétique. Vers 1909, certains
traits, dans un visage ou un corps, sont comme des balafres. Plus tard,
ils ressemblent à des égratignures. Tracées avec verve, les lignes
peuvent constituer des noirceurs appuyées; elles peuvent étre rapides,
cinglantes; elles peuvent aussi suggérer la forme avec une délicate
retenue. Les aquarelles et certaines lithographies montrent le róle que
la couleur est capable de jouer chez l'artiste. Dans les peintures à
l'eau, les touches se signalent à la fois par leur emportement, leur
largeur, les finesses de leurs transparences et leur force évocatrice.
À mesure que Kokoschka avance, sa manière se fait de plus en
plus fougueuse et baroque. Les lignes se fragmentent, se tordent,
cheminent avec célérité, parfois avec précipitation; le jeu des lumiéres
et des ombres ne tient pas moins de place que le mouvement du dessin.