Texte intégral: Edouard Pignon

Une étroite amitié nous lie désormais et chaque projet nous rapproche davantage: 
l'exposition «Douze peintres d'aujourd'hui» que je présente en février 1943 à la Galerie 
de France oü il est au premier rang aux cótés de notre cher Villon; l'élaboration patiente — 
motif d'espoir pour nous tous durant cette lugubre période — du Salon de Mai qui nous unira 
chaque année dans un fraternel labeur depuis la Libération jusqu'à maintenant; enfin la 
préparation retardée par les événements, de mon ouvrage paru en 1945 «Les problémes 
de la peinture» où, selon mes voeux, il occupe aux yeux de tous la place majeure. 
Qu'il n'y ait pas d'équivoque à ce propos. Je n'ai fait qu'enregistrer une montée specta- 
culaire qu'il a su effectuer, déjà dans la plus entiére solitude, en s'affirmant aux divers Salons 
d'Automne, dans l'album et la présentation de «Cinq peintres» à Paris en 1944, lors de la 
manifestation de groupe au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles en 1945 et, mieux encore, 
avec son exposition particuliére à la Galerie de France en 1946. 
Il a si pleinement conscience de l'objet de sa recherche qu'il en définit avec pertinence, 
avec lucidité, le sens et la portée dans un texte redigé à mon intention au début de 1944 
oü sa conclusion méme, malgré les affres de la guerre, anticipe magistralement avec con- 
fiance sur la voie qu'il allait désormais faire sienne. On peut en juger par les quelques lignes 
suivantes d'une indéniable valeur prophétique: 
«Une grande partie de l'effort actuel va créer un échange constant, un mouvement 
de va-et-vient entre tous les éléments du tableau, comme un dialogue qui en accentue l'ex- 
pression, faisant que, gonflées de réalités perçues à différents instants, à différents niveaux 
et condensées dans la toile, toutes les parties se répondent ... 
La conquéte progressive de l'espace coloré permettra, peut-étre un jour, à la peinture, 
depuis des siécles délice d'amateurs privilégiés, de redevenir jouissance collective ... 
La jeune peinture ne veut pas un divorce entre ses créations et le réel, entre l'artiste 
et le monde, mais au contraire leur communion et l'exaltation de la réalité dont elle aspire 
à condenser le drame.» 
Dans le modeste et vétuste atelier de la rue du Moulin Vert oü il vécut plusieurs années, 
dans celui plus vaste de la rue des Plantes qu'il occupe depuis longtemps, j'ai souvent revu 
Pignon, toujours aussi fidéle à son choix d'antan, à son éthique, à ses amitiés, à ce chant 
profond de l'existence qui coule de source en lui. Sa générosité fonciére l'éloigne de tout 
calcul comme de tout compromis. La richesse de sa nature l'entraine dans un irrésistible 
élan au sein duquel l'optimisme n'a cessé de l'emporter sans conteste. 
Pourtant que de sacrifices consentis, que d'obstacles surmontés pour détourner le 
cours fatal des choses, pour s'opposer au destin, pour sortir de la condition de mineur qu'il 
no)
	        
Waiting...

Note aux utilisateurs

Cher utilisateur,

en raison des récents développements de la technologie web utilisée dans le visualiseur Goobi, le logiciel ne supporte plus le navigateur que vous utilisez.

Veuillez utiliser l'un des navigateurs suivants pour visualiser correctement cette page.

Merci de votre compréhension.