retenus par le présentateur, est proportionné à la force imaginative
de celui qui les a vus à travers la caméra, d'abord, et de celui qui
les a sélectionnés d’après certains critères, ensuite. Les deux se con-
fondant parfois, pour ne faire valoir que les vertus d'une seule per-
sonnalité, s'obstinant à rechercher le captivant et le séduisant, il me
sera donné de découvrir, sans trop d'effort, dans l'ensemble des images
coordonnées, selon les impératifs d'une idée centrale, les traces de
l'intelligence, avide de perfection, et les manifestations du cœur qui
éclaire, en s'éclairant. Certes, il peut y avoir, de la part de l'admira-
teur moderne, des oscillations dans les sensations que provoque une
exposition, conforme à l'esprit du siècle, tout comme il peut y avoir
des ballottements dans les sentiments que fait naître la variété des
themes qui se veulent actuels: étant de mon temps, je dois subir,
nécessairement, l’emprise tantôt du machinal et tantôt du sentimental.
Edward Steichen, homme de son epoque, produit admirable du
monde humain, humaniste technique avant la lettre, parvient, tout
naturellement, pour ainsi dire, à nous offrir un cadeau multiforme,
par lequel il semble faire appel, sans cesse, à deux courants sauveurs,
trop profondément cachés sous les assises de l'égoisme et de la haine :
l'énergie créatrice et l'amour ou le désir de l'harmonie et la passion
de l'unité.
Sa collection sera pleinement comprise par ceux qui auront vu
jaillir de la cruauté et du carnage de notre ére ce témoignage vivant,
equivalant à un consentement public au grand destin de l'Homme.
Et c'est là la plus belle lecon qu'il puisse nous donner.
Pierre Gregoire
Ministre des Affaires Culturelles