19 04 ‘ 2022 museomag Fin juin, le MNHA prêtait son cadre à une conférence de presse organisée par l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg dans le contexte scénique de notre exposition Le passé colonial du Luxembourg. Cette manifestation, inti- tulée «D’un passé colonial à un présent Fairtrade», a permis à la presse luxembourgeoise de rencontrer Joachim Munganga, le fondateur de la coopérative de café congolaise SOPACDI (Solidarité Paysanne pour la Promotion des actions Café et Développement Intégral) et de recueillir le témoignage d’un homme qui toujours charrie la mémoire du passé colonial, celle de ses ancêtres. Un passé qui ne passe pas et que le MNHA vient d’exhumer sous forme d’exposition, induisant ainsi un véritable débat de société. «Quelle émotion! En entrant dans votre musée, j’ai d’emblée vu la figure de mon père sur une affiche…», nous confie Joachim Munganga. Son père, décédé il y a six ans, figure en effet sur un panneau publici- taire accroché à l’entrée pour promouvoir la vente de paquets de café bio que le musée commercialise dans le cadre de notre partenariat avec Fairtrade. «Je suis né un an avant la déclaration de l’indépendance du Congo. Je n’ai donc pas vécu dans ma chair les années d’esclavagisme sous l’ère coloniale, mais les traumas de mes proches continuent de résonner en moi. Toute mon enfance, j’ai entendu les témoignages de mes parents et de mes frères et sœurs, victimes des sévices infligés par les colons. Si l’on ne travaillait pas assez, pas assez vite ou si l’on était accusé arbitraire- ment de ne pas s’exécuter dûment, c’était le cachot où on était roué de coups barbares, trois fois par jour: matin, midi et soir.» UN GÉNOCIDE NON DECLARÉ Il respire profondément avant de poursuivre: «La mal- traitance était légion: votre exposition illustre bien cette terrible exploitation de l’homme par l’homme. Le chapitre sur la production sanguinaire du caoutchouc est particulièrement éloquent: ce qui s’y est déroulé sous l’autorité de Léopold II est un véritable génocide non déclaré… Des milliers de citoyens ont été massa- crés, et même enterrés vivants.» Depuis cette ère de profonde détresse où l’on travaillait sur base d’un «contrat à vie pour quelqu’un qu’on ne pouvait ni voir ni même saluer, les travail- leurs étant souvent traités de ‘singes’, suspectés de transmettre des maladies», fustige encore Joachim Munganga, plus de soixante-dix ans se sont Joachim Munganga lors de sa visite de l’exposition Le passé colonial du Luxembourg, à l’affiche du MNHA jusqu’au 6 novembre. PLUS UN GRAIN DE RESSENTIMENT (1/2) PASSÉ COLONIAL ET PRODUCTION DE CAFÉ ÉQUITABLE: RENCONTRE AVEC JOACHIM MUNGANGA, PRÉSIDENT DE LA COOPÉRATIVE DE CAFÉ CONGOLAISE SOPACDI © éric chenal