8 museomag   04 ‘ 2022 
«LA SITUATION DE L‘ÉTAT 
LUXEMBOURGEOIS EST AUTRE»  (2/2) 
© 
éric 
chenal 
ne jouent «que» le rôle d’assistants. Pour que ces 
derniers soient responsables, il faut qu’ils aient agi 
en connaissance de cause et que leur assistance ait 
contribué de manière significative à la commission 
de l’acte illicite. Si l’on considère que la colonisation 
était illicite, le fait que le Luxembourg ait négocié et 
organisé la participation de ses ressortissants à celle- 
ci, notamment au Congo belge, pourrait tomber 
sous cette catégorie. Néanmoins, il faudrait alors 
voir si cette contribution pourrait être considérée 
comme significative. Cela dit, l’absence éventuelle 
de responsabilité juridique de l’État luxembourgeois 
n’exclurait aucunement l’existence d’une responsabilité 
politique ou morale, tout comme elle n’exclurait pas 
la responsabilité juridique éventuelle de personnes 
privées auteurs de crimes coloniaux. 
Contrairement à ce qui se fait actuellement en 
Belgique, le monde politique luxembourgeois 
discute peu du passé colonial, si on fait abstraction 
de quelques questions parlementaires sur le 
sujet et du financement d’une étude historique 
commanditée par le Ministère d’État auprès du 
Luxembourg Centre for Contemporary and Digital 
History (C2DH) de l’Université du Luxembourg. 
Or selon un récent article que vous avez publié 
dans le Lëtzebuerger Land («Vous avez dit légal?», 
22.07.2022), vous estimez qu’au Luxembourg 
aussi le passé colonial «appellera tôt ou tard 
des mesures de la part des pouvoirs législatif et 
exécutif, voire, notamment en cas de carence de 
ces derniers, du pouvoir judiciaire»? Selon vous, 
quelles démarches pourraient être nécessaires en 
ce sens au Grand-Duché? 
Le fait que le gouvernement se soit tourné vers 
l’Université mérite d’être salué – c’est un début 
d’introspection dont certains acteurs privés devraient 
s’inspirer. Néanmoins, vu les effets persistants du passé 
colonial sur la société luxembourgeoise, notamment à 
travers un racisme dont les personnes non visées ne se 
rendent souvent pas compte, il me semble nécessaire 
que le Parlement en discute aussi. Évidemment, les 
associations antiracistes et afrodescendantes devront 
être associées à ce processus pour que ce dernier puisse 
déboucher sur des mesures légitimes et effectives. 
Propos recueillis par 
Régis Moes