6 museomag   04 ‘ 2022 
Michel Erpelding lors de sa visite de l’exposition Le passé colonial du Luxembourg au MNHA. 
© 
éric 
chenal 
«LA SITUATION DE L‘ÉTAT 
LUXEMBOURGEOIS EST AUTRE»  (1/2) 
ENTRETIEN AVEC MICHEL ERPELDING, SPÉCIALISTE DE L’HISTOIRE DU DROIT 
INTERNATIONAL 
Docteur en droit public et chercheur à la faculté 
de droit, d’économie et de finance de l’Université 
du Luxembourg, Michel Erpelding est spécialisé en 
histoire du droit international. Il a consacré une 
partie de ses recherches à la question des rapports 
entre esclavage et travail forcé, notamment sa thèse 
de doctorat. C‘est à lui que revient la clôture de 
notre cycle de conférences: le jeudi 13 octobre, son 
intervention aura pour thème «Vers des réparations 
au titre du colonialisme?». 
M. Erpelding, qu’est-ce qui vous a amené à vous 
intéresser au droit colonial? 
Lorsqu’on s’intéresse à l’histoire du droit international, 
le colonialisme et le droit colonial ne sont jamais 
très loin. C’est que la montée en puissance de l’État 
moderne coïncide en grande partie avec l’expansion 
coloniale européenne. Ce n’est par exemple pas un 
hasard si Hugo Grotius (1583-1645), souvent présenté 
comme le «père» du droit international moderne, fut 
le conseiller juridique de la Compagnie néerlandaise 
des Indes orientales (VOC). Cette relation symbiotique 
entre droit international et colonialisme européen ne 
fera que s’accentuer au cours des siècles suivants. 
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, des traités organiseront la 
déportation de millions d’Africains réduits en esclavage 
vers les différentes possessions coloniales européennes. 
Au XIXe siècle, s’appuyant sur la notion discriminatoire 
de la «civilisation», s’impose de plus en plus l’idée 
que seuls les Européens seraient des acteurs légitimes 
du droit international. D’où aussi leur prétention à 
s’installer partout et à y exploiter les populations 
locales, voire à les chasser de leurs terres ancestrales 
au profit de colons européens. Cette entreprise 
n’a jamais été purement nationale. Elle aurait été 
impossible sans coopération internationale. D’ailleurs, 
les hauts-fonctionnaires coloniaux, souvent polyglottes 
et habitués à interagir au-delà des frontières, joueront 
un rôle clé dans la mise en place et le fonctionnement 
de la Société des Nations. En témoigne d’ailleurs le cas 
de Charles Schaefer (1856-1922), premier agent mort 
au service d’une organisation internationale, que vous 
présentez dans l’exposition. De ce point de vue, droit 
international et droit colonial ne furent que les deux 
faces de la même médaille.