20 museomag 01 ‘ 2021 HAUTE COUTURE PLEINS FEUX SUR VAN HERP: UNE CONFUSION PERSISTANTE ENFIN DISSIPÉE La Vierge tissant le voile du temple, du flamand Willem van Herp (Anvers, 1614-1677) vient d’intégrer les collec- tions du Musée national d’histoire et d’art. La peinture fait l’objet d’un article dans la Revue Belge d’Archéo- logie et d’Histoire de l’Art*, dissipant une confusion persistante relative à son sujet et à son auteur. UN CUIVRE DE GRANDE TAILLE La scène est peinte sur une planche de cuivre, support très cher aux Flamands. Il permet en effet une exécu- tion rapide – la surface ne nécessitant que peu de pré- paration – et apporte un éclat singulier aux couleurs, le métal contribuant à leur brillance. Ces peintures sur cuivre résistaient par ailleurs mieux au voyage, moins sensibles aux variations d’humidité et de tempéra- ture. De taille réduite, elles étaient souvent destinées à l’exportation. Cependant, cette œuvre affiche des dimensions étonnamment grandes pour un tel support. Willem van Herp utilisait fréquemment de grandes planches, pour répondre à la demande du marché. Entre 1650 et 1660, son nom apparaît souvent dans la correspondance des Forchondt et des Musson, négo- ciants anversois avec des filières en Espagne, où son œuvre était recherchée, ses cuivres de grande taille en particulier. De Malaga à Anvers, les marchands réclament en 1663 «des copies d’après Rubens et copies de la main de Van Harp dont vous nous en avez livrés jadis, les grandes figures se vendent mieux que les petites, et aussi peu de petits cuivres». UN SUJET CHOISI Van Herp échappe ici à la source rubénienne requise, pour se tourner vers Guido Reni et ses Couseuses (ci-contre) qui appartenait au cardinal Mazarin. Il y emprunte l’agencement général et certains détails de la composition, mais l’idée de l’ange adolescent cou- ronnant la Vierge et de la jeune femme brodant à son métier, lui vient d’une estampe de Wierix (en haut à droite); la posture du personnage de gauche et celle de Marie, d’une gravure d’après Martin de Vos. Le peintre combine ses sources visuelles, mais il connaît aussi bien le Protévangile de Jacques [10, 1-2], qui lui inspire ce sujet rare dans l’iconographie chré- tienne. À douze ans, après le mariage avec Joseph, Marie est convoquée dans le temple de Jérusalem, avec sept autres filles de la tribu de David, pour y tisser un voile. À la différence du peintre italien, le Flamand introduit sept vierges aux côtés de Marie – conformé- ment au récit. Entourée de ses compagnes, Marie coud pendant qu’un ange vient la couronner de fleurs, sym- Willem van Herp, Marie tissant le voile du temple, vers 1660, huile sur cuivre (87,3 x 140 cm), collection MNHA. © tom lucas