7 03 ‘ 2020   museomag 
THREE QUESTIONS TO... 
Trois questions à… 
Maja Neerman, historienne de l’art: 
Comment se fait-il que cette photo ait été prise à 
Venise, qui plus est dans la maison Rubelli, grand 
créateur et fabriquant de tissus haut de gamme? 
Je connais Carla depuis des années déjà: lors de notre 
première rencontre, elle m’a tout de suite proposé de 
poser pour elle. Longtemps, je l’ai croisée à des vernis- 
sages, dîners, ventes aux enchères... mais jamais nos 
agendas nous ont permis d‘organiser une séance. En 
septembre dernier, alors que je croisais Carla à Veni- 
se à l’occasion de l‘exposition «From Titian to Rubens» 
au Palazzo Ducale, l’occasion s’est enfin cristallisée: 
elle m‘a donné rendez-vous un dimanche matin à la 
Maison Rubelli. Le lieu de cette entreprise familiale 
vénitienne, fondée au 19ème siècle, est extraordinaire et 
m‘a tout de suite impressionnée. 
Comment s’est déroulée cette séance ? 
Le professionnalisme de Carla, très sûre de ses choix, 
m‘a confortée et rapidement mise à l‘aise. Elle m‘a de- 
mandé de m‘asseoir sur une chaise près de la fenêtre 
pour puiser la lumière du jour, m’a drapée de tissus. 
Puis elle s‘est mise à l’œuvre, reposant l‘appareil juste 
pour d’infimes ajustements de plis au niveau des tissus 
ou de mes cheveux. Le tout s’est déroulé avec beau- 
coup de simplicité et de décontraction. Seule la météo 
a failli jeter un voile sur la séance: ce matin-là, le ciel 
était gris et couvert, on risquait de perdre la lumière 
d’une minute à l’autre. Pour Carla, c’était une course 
contre la montre avant que l‘orage n‘éclate. 
Avez-vous pu participer à la sélection de la prise de 
vue retenue pour le catalogue? 
Non, ce fut le seul choix de Carla. Au cours de la 
séance, j’avais déjà le sentiment que cette prise de vue 
serait son coup de cœur. J‘aurais bien aimé voir toutes 
les images mais je pense que le regard qu‘un modèle 
porte sur soi est tellement chargé de vanité et de com- 
plexes à la fois qu’à la fin, c’est un soulagement que 
seul l‘artiste, guidé par sa propre sensibilité artistique, 
tranche. Mais j‘adore le résultat: c’est une image in- 
temporelle. J‘y vois une authenticité et une certaine 
mélancolie qui me touchent et dans lesquelles je me 
reconnais. 
Malgorzata Nowara 
Maja Neerman (2019) 
© 
carla 
van 
de 
puttelaar