13 Comment être de son temps ? Jean-Luc Mousset La rénovation de l'Aile Wiltheim du MNHA par le Fonds de Rénovation de la Vieille Ville a été une bonne occasion de repenser la section Arts décoratifs et populaires qui est consacrée à un volet de l’histoire de la civilisation au Luxem- bourg. Afin de pouvoir être utile à la société d'aujourd'hui, les concepteurs de la nouvelle exposition permanente ont recouru à une stratégie de modernisation. Celle-ci prend en compte deux faits actuels, l’un d’ordre général, la mon- dialisation, et l’autre particulier, un aspect de la vie socio- économique du Luxembourg. Ces choix orientent de façon souple le concept muséal sans l'enfermer dans un discours monolithique. La présentation fait également appel à plu- sieurs disciplines dont l’histoire culturelle, l’histoire de l’art, l’histoire sociale et l’histoire économique. Toutefois cette ouverture au monde actuel ne détermine pas fondamentalement le contenu de l'exposition. Celle-ci veut donner une réponse à deux questions qui ne sont pas propres à notre époque : quelles ont été les manières d'habiter au Luxembourg ? Quels ont été ses arts appliqués ? La présen- tation a été divisée en deux grands chapitres chronologiques présentant chacune des approches différentes. Ces dernières restent également très classiques. Le champ géographique couvre le Grand-Duché actuel. La première partie traite le Luxembourg sous l’Ancien Ré- gime, à une époque où il forma le centre d’une province pauvre qui n’a pas participé à l’essor des Pays-Bas du Sud. Les manières d'habiter sont essentiellement présentées sous l'angle de l'hiérarchisation sociale des intérieurs qui sont nobiliaires, bourgeois ou ruraux. Ce qui est moins habituel, c'est de réunir dans un même musée les trois milieux sociaux cités. La deuxième partie est consacrée à un petit État de- venu indépendant au 19e siècle et prospère au 20e siècle. Elle reprend comme fil conducteur la succession des styles, ce qui est souvent le cas des musées des arts décoratifs. Trois raisons expliquent pourquoi l’approche n’a pas été la même pour l’ensemble de l’exposition. L'architecture historique in situ n’offre en effet une bonne adéquation entre contenant et contenu que pour la première partie, les collections dis- ponibles sont inégales et enfin, l'état des connaissances est insuffisant pour certaines périodes et rend difficile la formu- lation d’un discours équilibré. Pour être de son temps, il faut s'intéresser à son époque. Au- jourd'hui, la mondialisation des échanges économiques et des informations exerce une influence déterminante sur les ma- nières d'habiter et les arts appliqués du monde occidenta lisé. Le succès du design des créateurs et du design de masse en constitue une preuve éclatante. De même, l’interconnexion croissante au niveau planétaire, européen et, pour le Luxem- bourg également au plan de la Grande Région, a ravivé le débat identitaire. La nouvelle présentation porte comme titre « De Mansfeld au design (1500-2014) » et comme sous-titre « Les manières d'habiter et les arts appliqués au Luxembourg, une voie origi- nale ? ». Le titre associe Mansfeld, un personnage de l'histoire du Luxembourg, à un concept plus universel, le design. La question finale sous-entend également une dualité puisque le spécifique se définit par rapport au général. En effet, l'en- semble du discours de l'exposition repose sur un arrière-fond local – international. La question du sous-titre sert de fil con- ducteur à une présentation qui avait besoin d'un thème fédé- rateur à cause de la grande diversité des sujets traités et des collections présentées. Au fur et à mesure qu'il parcourt les salles, le visiteur recevra des éléments de réponse à cette ques- tion. À la fin, il pourra confronter ses propres impressions et réflexions à une conclusion qui lui sera proposée. Les responsables souhaitent attirer un public « mobile », c’est- à-dire un public qui est intéressé à comparer l’histoire et l’art du Luxembourg à ce qu’il a pu voir pendant ses voyages ou pendant ses séjours à l’étranger. Ceci se fera par le choix des objets/thèmes, par la formulation des thèmes et par la rédac- tion des textes d’accompagnement adaptés en conséquence. Ce public contemporain mérite d'être traité comme une cible puisque son nombre va s'agrandir à l'avenir du fait d'un