124 Le thé ou l’ouverture à l’Asie Jean-Luc Mousset Au XVIIIe siècle, l’intrusion de l’Asie dans l’univers mental des habitants du Luxembourg modifie leur représentation du monde. Ce continent est à l’origine de l’innovation en ma- tière de goût avec le développement de l’exotisme. La mode des boissons chaudes sucrées, comme le thé et le café, gagne les élites, puis progressivement la bourgeoisie. Récemment, le MNHA a eu la chance d’avoir pu acquérir une rarissime théière en argent de l’orfèvre de la ville de Luxembourg, Jean Michel Kutzer (vers 1700-1766). Des considérations stylistiques et techniques permettent de la da- ter vers 1730. Il s’agit donc d’une œuvre d’un Kutzer relative- ment jeune encore et qui, venant de la Bavière, a commencé à travailler à Luxembourg au plus tard en 1727. Signalons que les pièces d’argenterie de table luxembourgeoise se comptent sur les doigts d'une main. Haute de 15,5 cm, la théière est en forme de poire avec des côtes droites qui se prolongent dans le couvercle renflé. La panse repose sur un petit pied. Le goulot curviligne est divisé au milieu par un anneau. Le bec pouvait à l’origine être fermé par un couvercle dont il ne reste plus que la poucette. L’anse en bois noirci est tracée en point d’interrogation muni d’une poucette. Enfin, le couvercle sommé d’un fleuron ouvre laté- ralement à l’aide d’une charnière à poucette. L’arrivée du thé en Europe va de pair avec une autre nouveauté venue également d’Asie, la porcelaine. En effet, le thé est servi à l’origine dans les bols à soucoupe en porcelaine chinoise. à Luxembourg, l’archéologie atteste l’usage de ce genre de céramique à la fin du XVIIe siècle chez les Neunheuser, fa- mille de la bourgeoisie de robe, et vers 1740-1750 au Conseil provincial où se réunit l’élite urbaine. L’avocat de Mignon fig. 1 Théière, no d’inv. : 2008- 098/001 (© MNHA, photo Tom Lucas).