C'est essentiellement la Chine qui devrait se reconnaitre dans les formes, dans les rythmes et dans la conception de l'espace qui caractérisent les œuvres de Zao Wou-Ki. La Chine, plus que toute autre civilisation, a véhiculé en permanence le sentiment d'harmo- nieuse et de totale union avec la nature. Ses artistes anciens, surtout à l'époque des Song (960-1279) — particuliérement les peintres lettrés et les maitres bouddhistes tch'an — ont favorisé l'autonomie des formes et des rythmes que revelent les paysages, les dragons et les poissons... Affranchi des contraintes du passe, Zao Wou-Ki, par ses coups de pinceau, ses éclaboussures, ses coulures, a su donner une vie toujours nouvelle à ces formes et à ces rythmes. Devenus abstraits, ceux-ci se rattachent cependant aux pierres, aux eaux et aux nuages, aux végétaux et aux animaux. «Ses tableaux ont avec la nature gardé un air de famille» ecrit Henri Michaux. Zao Wou-Ki a repris l'espace pictural chinois oü la nature n'est pas ramenée à la mesure de l'homme, oü tout est fluide et rien n'est fixe. Il y multiplie les perspectives mouvantes pour en augmenter l’im m e n S it é .L e S g r a nd e S d im e n S 10 ns d e S e S p e in t u r e S f. a C il it e n t a u spectateur les voyages imaginaires, toujours différents, parmi des univers indefinis. Ici les brumes et les vapeurs — qui constituent le souffle majestueux des montagnes — se mélent et s'opposent aux foudroyantes énergies produites par les flots et les tourbillons d'eau et de laves.