De plus, il comprend qu'il faut échapper au décoratif. « J'aime, dit-il, qu'une peinture décore, qu'elle soit «décorante», mais Je pense qu'elle doit aller plus loin, atteindre à un but plus profond.» Il suffit de citer de telles paroles pour attester que ce peintre est aussi lucide qu'exigeant. En effet, Montanier congoit le tableau ni comme une hátive confession expressionniste, ni comme une impro- visation tachiste ou gestuelle, ni comme une image deconcertante ou agressive. Ä aucun moment, il n’a été enclin à croire que plus une oeuvre est désordonnée et mal peinte, plus elle est géniale. Pas de coups de poing dans son art, aucune tentative de nous violenter. En vain l'on chercherait aussi aprés 1945 une évolution qui se signale par des rup- tures radicales et de brusques volte-face. Montanier se developpe lentement, dans le calme, sans jamais songer à répondre aux futiles impératifs de la mode. Épris d'une construction à la fois claire et solide, il nous propose des formes nettes, définies par un trait ferme, qui peut étre anguleux aussi bien que flexible, mais qui n'est jamais dur ni cruel. Au demeu- rant, si concertées que soient ses compositions, le coloris évite qu'elles ne versent dans la froideur. Non qu'il comporte beaucoup de teintes vives: les jaunes et les rouges y sont plutót rares et nulle crudité ne les entache. D' habitude on voit dominer les bleus, les violets, les gris, les bruns, les verts sourds — et pourtant les oeuvres ont en définitive un côté chaleureux, amical. D'autant plus que la matière, tantôt grenue, tantót onctueuse, mais toujours amoureusement travaillée, ajoute son aspect moelleux et sa fine saveur à l'agrément du chromatisme.