TAL COAT Tal Coat a sans doute évolué de façon plus surprenante que tous les autres artistes de sa génération. Après avoir eu une période réaliste, il subit au cours de la guerre l’ascendant de Matisse, et en 1945 celui de Picasso. Une couleur vive, savoureuse, un dessin large et synthétique caractérisent les toiles qu'il exécute à cette époque et qui le classent parmi les jeunes les plus remarquables. En 1946-1947, il consolide sa re- nommée en peignant des poissons dans un aquarium. Les teintes y sont assourdies avec finesse; la päte est mince, mais vibrante. Et si d’abord il nous permet de recon- naitre les poissons, dans les derniéres oeuvres de la série nous ne voyons plus que la trace du ballet rapide et scintillant qu'ils inscrivent dans l'eau. Vers 1949, il rompt avec cette maniére à laquelle il doit des oeuvres si originales et, sous l'influence des peintres chinois de l'époque Song, il commence à ne mettre sur sa toile que quelques légers frottis de teintes pâles. Son but? Évoquer les crevasses et la mousse d’un rocher ou la pluie qui frappe une montagne. Continuant à vouloir étre l'intrepréte effacé d'une nature que la civilisation moderne n'a pas altérée et qui est tout au plus marquée par les traces d'une humanité primitive, Tal Coat dessine finalement quelques signes balbutiants, d'aspect préhistorique, sur de vastes surfaces oü il dégrade avec sensibilité un nombre restreint de couleurs. Joseph-Emile Muller - L'art au XX* siécle ( Larousse, Paris, 1967) (...) L'influence de son voisin et ami, André Masson, y aidant, il découvre alors dans la peinture de l'Extréme-Orient, le paysage de l'époque Song en particulier, le modéle, ou, plus exactement, la suggestion de ce qu'il veut faire; et il en peint, du coup, des oeuvres sans précédent dans la peinture occidentale, des paysages ou la nature n’est plus regardée de l'extérieur par un spectateur, mais où elle est vue, et, plus encore, éprouvée de l’intérieur, un peu comme elle pourrait se voir elle-même, par un esprit qui se fond en elle, sans toutefois s'y perdre, et participe à sa poussée intime. (...) Aussi tout n'est-il chez lui que remous, frémissements, flux, mani-