de ses camarades, il n’hésite pas à recourir à la leçon oubliée de Cézanne ou des Cubistes pour ordonner ses formes, les organiser dans l’espace. Par la suite, il ne néglige aucune acquisition possible, ni la touche fougueuse des grands Anciens, ni les aplats souverains et les sonores orchestrations colorées de Matisse, pour entonner ce chant altier, confiant qui s'éléve en lui aux pires heures de l'occupation, alors qu'il affrontait au sein de la Résis- tance des risques dramatiques. Aprés la Libération, à l'exemple de Picasso qu'il rencontre davantage et auquel il se lie d’une étroite amitié, le ton devient plus grave, en résonanc? avec les dures conditions d'existence des remmailleuses de filet de Collioure ou en 1948 des mineurs de son pays natal. Scn graphisme plus noueux, plus incisif, fróle parfois une tension expressionniste; c'est-à- dire la distance qui le sépare des deux antagonismes alors en vogue: Réalisme et Abstraction, qui, à défaut d'obtenir une concession de sa part, se disputent l'honneur de l'injurier. Comme le va-et-vient mouvant de la vie, la série des pécheurs d'Ostende lui apporte au méme moment un autre souffle, un apaisement, avec la houle majestueuse des rythmes balancés, entrelacés et les subtils accords des douces, des fraîches tonalités de la Mer du Nord. Un vaste univers s’offre, accueillant au regard du spectateur et l’invite à s’y promener avec quiétude au milieu des gestes humains quotidiens. Peu après, dans les années 50, le Midi des vignerons et des oliviers s'impose, plus farouche, plus nerveux, découpé davantag: dans la lumière, plus direct aussi par les angles de vue rapprochés, le coloris plus intense. Dans la fournaise estivale de la campagne romaine et les tourbillons de poussiére dorée des battages, comme dans les fiévreux et virulents combats de coqs de Marles-les-Mines, il se découvre une passion nouvelle, dévorante, pour le mouvement, pour les couleurs jaillis- santes, pour l'exaltation du flux méme de la vie dans son déchainement superbe. Les deux thémes, qu'il expose en 1960 et 1962, finissent bientót par se rejoindre dans les scénes de bataille, grandioses, remplies de clameurs et de fureur conquérante, mais dont le joyeux baroquisme n’a rien de terrifiant. La série des plongeurs, avec ses froides mais chantantes harmonies qu’il mène parallèlement, par la suite celles plus bestiale des têtes de guerrier ou plus ironique des seigneurs de la guerre, démontrent bien que si notre artiste cède à l'esprit de violence de l'époque, il entend faire triompher, selon son tempérament, la rayon- nante puissance de l'énergie des hommes. Ces gerbes élancées, ce fantastique ballet de formes enchevétrées qu'il nous offre, restituent au mieux le choc violent de la multitude des sensations qu'il parvient à orchestrer selon leur fascinant déploiement de force. Cette quéte de la réalité qu'il définit alors clairement à Jean-Louis Ferrier et qu'il n'a cessé de poursuivre dans ses peintures, ses decors de theätre ou ses reliefs monumentaux