chez tant d'artistes du XXe siécle, on la constate aussi chez Moore: beaucoup de ses sculptures tiennent du rocher ou du tronc d’arbre autant sinon plus que du corps humain. C'est qu'il s'agit d'enraciner l'homme à nouveau dans la vie, de le remettre en contact avec cette nature «sauvage» à laquelle la civilisation industrielle tend de plus en plus à l'arracher. Par ailleurs, Moore n'incline nullement à nous faire rencontrer dans son oeuvre cette humanite frelatee, superficielle, cabotine qui trop souvent se pavane aujourd’hui sous nos yeux. Il veut nous mettre en présence d'une humanité moins policée, plus fruste, et par là méme plus authentique. Ses personnages appartiennent à l'univers des mythes, non à cette actualité éphémére dont nous parlent les journaux. C'est pourquoi ils sont graves, distants, mysterieux. Ils viennent du fond des äges. Et s’ils ne cherchent pas ä seduire ceux qui aiment les harmonies faciles, s’ils sont etrangers à la joliesse, ils n'ignorent pas les vérités profondes de la vie. Le Guerrier au bouclier pourrait sortir de l’Iliade, mais il sort aussi de la derniere guerre mondiale; il materialise aussi cette opi- niátreté presque inhumaine avec laquelle la Grande-Bretagne, blessée, mutilée, s'est alors défendue. Le Roi et la Reine sont des personnages d'épopée ou de tragédie, des monarques mythologiques. Alors que